Vendetta, le roman gothique de Marie Corelli datant de 1890 vient d’être traduit pour la première fois en France ! Les éditions Eyrolles se sont emparées de ce récit à succès en le renfermant dans un bel écrin : une couverture carbone de toute beauté.
Au fil des pages, on découvre une plume à la fois romantique et incisive, parfois ironique et provocante. Comment rester insensible face à une intrigue cousue au fil noir ? L’autrice tisse une toile d’araignée avec finesse, dans laquelle le lecteur se plait à se ligoter. Le cachot est divin, le suspense maintient l’emprise du début à la fin.
Quel machiavélisme !
Vendetta explore des thèmes extrêmement puissants comme l’amour romantique déçu, le jeu des apparences, l’adultère, la maladie, la mort et bien sûr, la vengeance… L’ouvrage est très riche.
C’est aussi, un extraordinaire roman d’atmosphère qui retranscrit à la perfection les décors et les sensations de son personnage principal. Les descriptions empruntent un style lyrique qui bercent le lecteur par moment, pour lui glacer le sang ensuite.
Dracula n’a qu’à bien se tenir !
Voici le synopsis :
1884. Alors qu’une épidémie de choléra frappe Naples, le comte Fabio Romani est déclaré mort et placé à la hâte dans le caveau familial. Par miracle, le jeune homme survit à la maladie et se réveille dans son cercueil. En s’extrayant du tombeau, il découvre un trésor inestimable, amassé là par le célèbre brigand Carmelo Neri ! Le bonheur de Fabio est complet : il a vaincu la maladie, assuré sa fortune, et il s’apprête à retrouver sa fiancée, la belle et douce Nina.
Le choc est donc terrible lorsque le comte découvre que son meilleur ami poursuit une liaison de longue date avec Nina, et qu’aucun d’eux ne pleure sa mort. Le coeur brisé, l’honneur bafoué, Fabio décide de prendre sa revanche…
Un court extrait, juste pour le plaisir de frissonner…
« Chut ! Qu’était-ce ? Je m’arrêtai subitement, comme saisi par une main invisible. Je tendis l’oreille. Ce bruit, n’était-ce pas l’écho d’un joyeux rire carillonnant ? Un frémissement me secoua de la tête aux pieds. C’était le rire de ma femme. J’en connaissais parfaitement le tintement argentin ! Mon cœur, glacé, s’affaissa ; je me figeai, indécis. Elle riait sans retenue alors qu’elle me pensait mort, disparu à tout jamais ! Tout à coup, j’aperçus l’éclat d’une robe blanche entre les arbres. Obéissant à mon instinct, je m’écartai sans bruit et me cachai derrière un écran de feuillages, à travers lequel je pouvais voir sans être vu. Le rire cristallin résonna de nouveau dans le silence, et me transperça le cerveau comme une épée acérée. Elle était heureuse, et même gaie. Elle se baladait au clair de lune, le cœur léger, alors que… je m’étais attendu à la trouver cloitrée dans sa chambre, ou devant la Mater Dolorosa de la petite chapelle, priant pour le repos de mon âme, ses prières se mêlant à ses larmes. Oui, je m’étais attendu à cela. Nous autres, les hommes, devenons idiots quand nous aimons une femme. »
Une autrice adulée à son époque, qui a sombré dans l’oubli.
Marie Corelli (1855-1924) était, selon la rumeur, l’auteure préférée de la Reine Victoria, d’Oscar Wilde et de Winston Churchill. Très populaire au XIXe siècle, elle est complètement oubliée aujourd’hui. Son premier roman, A Romance of Two Worlds (1886), associe déjà deux thèmes récurrents dans son œuvre : l’occultisme et la romance. Le succès, cependant, fut médiocre. Il vint un peu plus tard, et massivement, avec Vendetta, or the Story of One Forgotten (1890), The Soul of Lilith (1892), Barrabas, a Dream of the World’s Tragedy (1893), et The Sorrows of Satan (1895). Ses tirages atteignirent alors des chiffres inconnus jusque-là (plus de cent mille exemplaires). Elle n’a jamais été traduite en français et ses œuvres sont maintenant tombées dans le domaine public. Elles sont aujourd’hui d’une étonnante modernité.